
Entretien professionnel : une obligation légale à ne pas négliger
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En principe, l’article L6315-1 du Code du travail dispose :
« A l’occasion de son embauche, le salarié est informé qu’il bénéficie tous les deux ans d’un entretien professionnel avec son employeur consacré à ses perspectives d’évolution professionnelle, notamment en termes de qualifications et d’emploi. Cet entretien ne porte pas sur l’évaluation du travail du salarié. Cet entretien comporte également des informations relatives à la validation des acquis de l’expérience, à l’activation par le salarié de son compte personnel de formation, aux abondements de ce compte que l’employeur est susceptible de financer et au conseil en évolution professionnelle. »
Ainsi, l’employeur dois d’organiser un entretien professionnel tous les deux ans avec chaque salarié. Cet entretien est un rendez-vous clé pour aborder les perspectives d’évolution professionnelle du salarié et ne doit pas être confondu avec l’entretien annuel d’évaluation.
Pour de nombreuses entreprises, cette obligation est souvent négligée, voire méconnue, alors qu’elle engage la responsabilité de l’employeur et peut conduire à des sanctions significatives. Voici un point complet sur ce que vous devez savoir en tant qu’employeur.
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1. Entretien professionnel ou entretien annuel : ne confondez pas !
Il est essentiel de distinguer deux types d’entretiens :
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- L’entretien annuel d’évaluation (facultatif) est centré sur l’activité passée du salarié : résultats, atteinte des objectifs, compétences techniques.
- L’entretien professionnel (obligatoire) est un temps d’échange prospectif sur l’avenir du salarié : ses souhaits d’évolution, les formations envisageables, son parcours professionnel.
Bon à savoir : Même si ces deux entretiens peuvent avoir lieu le même jour, ils doivent rester clairement distincts dans leur contenu et leur objectif.
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2. Ce que prévoit la loi : les obligations de l’employeur
Selon l’article L6315-1 du Code du travail, l’entretien professionnel doit être proposé à tous les salariés, quelle que soit :
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- La nature de leur contrat (CDI, CDD, apprentissage, professionnalisation)
- Leur durée de travail (temps plein, temps partiel)
Fréquence :
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- Tous les 2 ans à compter de la date d’embauche ou du dernier entretien.
- Au retour de certains congés : maternité, parental, sabbatique, proche aidant, adoption, arrêt longue maladie (>6 mois), mandat syndical…
- Tous les 6 ans, un état des lieux récapitulatif est obligatoire pour vérifier :
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- Que le salarié a bien eu ses entretiens professionnels
- Qu’il a bénéficié d’actions favorisant son évolution (formation, certification, progression)
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3. Déroulement de l’entretien professionnel
L’entretien professionnel est un moment privilégié d’échange entre le salarié et l’employeur, centré sur l’avenir professionnel. Contrairement à un entretien d’évaluation, il ne s’agit pas ici de mesurer les résultats ou la performance du collaborateur, mais de réfléchir avec lui à ses souhaits d’évolution dans l’entreprise ou au-delà, à ses envies de formation, à ses projets de mobilité ou de reconversion, ainsi qu’aux outils mobilisables pour y parvenir.
Le déroulement type de l’entretien s’organise généralement en trois phases. La première consiste à dresser une synthèse du parcours professionnel du salarié : ses expériences au sein de l’entreprise, les compétences acquises, les missions spécifiques exercées, les éventuelles difficultés rencontrées, ainsi que les formations suivies ou certifications obtenues.
La deuxième phase est consacrée à l’échange autour des projets de développement de l’entreprise et des aspirations du salarié. L’objectif est d’identifier les convergences possibles entre les besoins en compétences de l’organisation et les envies d’évolution du salarié, qu’il s’agisse de nouvelles missions, d’un changement de poste ou d’une orientation vers un nouveau métier.
Enfin, la troisième phase consiste à explorer les conditions concrètes de mise en œuvre du projet professionnel évoqué : quelles ressources internes peuvent être mobilisées ? Une formation est-elle nécessaire ? La VAE ou le CPF peuvent-ils être sollicités ? L’entretien est donc un outil de co-construction du futur parcours professionnel, avec un enjeu d’alignement entre les ambitions individuelles et les perspectives collectives.
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4. Conseils aux employeurs : bien préparer et valoriser cet entretien
Pour que l’entretien professionnel soit véritablement utile, sa préparation est essentielle. L’employeur doit avant tout créer un climat de confiance, en accueillant le salarié avec bienveillance et en clarifiant dès le début les objectifs de l’échange. Il est recommandé de s’appuyer sur une trame structurée, sans pour autant rendre l’entretien rigide ou formel.
L’écoute active est la clé : il faut laisser le salarié s’exprimer librement, l’inviter à illustrer ses propos avec des exemples concrets, et ne pas hésiter à reformuler pour s’assurer d’avoir bien compris ses attentes. Il est également crucial de rester neutre et de ne pas transformer cet échange en promesse d’évolution immédiate ou en jugement de valeur.
Pendant l’entretien, l’employeur doit interroger le salarié sur ses souhaits en matière de formation, de nouvelles missions ou d’évolution. Il pourra également lui rappeler les dispositifs accessibles comme le CPF, le CEP ou la VAE.
À l’issue de l’entretien, un compte rendu doit être rédigé, même si la loi n’en impose pas le contenu. Ce document joue un rôle de mémoire et de suivi, tant pour l’employeur que pour le salarié. Une copie doit être remise au salarié, sans obligation de signature de sa part. Enfin, il est important de donner suite aux demandes ou aux pistes évoquées, pour que l’entretien ne reste pas un simple exercice formel mais devienne un véritable levier de développement professionnel.
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5. Sanctions en cas de manquement : ce que vous risquez
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- Entreprises de moins de 50 salariés :
Pas d’amende automatique, mais un manquement peut être retenu devant les prud’hommes au titre de l’obligation de maintien de l’employabilité. Cela peut se traduire par des dommages et intérêts au bénéfice du salarié.
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- Entreprises de 50 salariés ou plus :
Si, au bout de 6 ans, le salarié n’a pas eu ses entretiens ou aucune formation non obligatoire, l’employeur devra abonder son CPF à hauteur de 3.000 € (article L6323-13 du Code du travail).
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Conclusion
L’entretien professionnel est bien plus qu’une simple obligation administrative : il constitue un levier stratégique pour fidéliser vos collaborateurs, identifier les besoins en compétences, et anticiper les évolutions de votre activité. En respectant ce cadre légal, vous contribuez à construire une politique RH durable et à sécuriser vos pratiques managériales.
Notre cabinet peut vous accompagner dans la mise en place et le bon déroulement de vos entretiens professionnels, afin de transformer cette obligation en véritable opportunité pour votre entreprise.