
L’obligation de formation des employeurs : ce que les entreprises doivent absolument savoir
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Dans un environnement où les compétences évoluent à grande vitesse, transformation numérique, nouvelles réglementations, changements organisationnels, la formation professionnelle n’est plus un simple outil de développement : c’est une obligation légale pour tous les employeurs, y compris les petites et moyennes entreprises.
Ne pas respecter cette obligation peut exposer l’entreprise à des sanctions financières, prud’homales, voire pénales. À l’inverse, une politique de formation bien pensée permet de sécuriser l’activité, de fidéliser les salariés et de rester compétitif.
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1. Obligation de formation et formation obligatoire : deux réalités complémentaires
Beaucoup d’employeurs confondent encore ces deux notions :
- L’obligation de formation est une responsabilité générale de l’employeur. Il doit veiller à ce que ses salariés soient en capacité de tenir leur poste, de s’adapter aux évolutions technologiques et de maintenir leur employabilité. L’article L6321-1 du Code du travail est clair :
«L’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail. Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations. »
- La formation obligatoire, en revanche, est imposée par des textes spécifiques pour certains métiers ou certaines activités (sécurité, hygiène, conduite d’engins, etc.). Comme le rappelle l’article L6321-2 :
« Toute action de formation qui conditionne l’exercice d’une activité ou d’une fonction […] constitue un temps de travail effectif et donne lieu pendant sa réalisation au maintien par l’entreprise de la rémunération. »
Concrètement, un employeur doit donc à la fois anticiper les besoins de ses salariés sur le long terme et mettre en place immédiatement certaines formations réglementaires indispensables.
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2. Les formations obligatoires : protéger les salariés et sécuriser l’entreprise
La loi impose à l’employeur d’organiser des formations obligatoires liées à la sécurité et à la santé des salariés. Ces formations doivent être dispensées dès l’embauche, lors d’un changement de poste, ou en cas de reprise après un arrêt prolongé.
Parmi les plus courantes :
- Sécurité au poste de travail : formation initiale et recyclages réguliers (gestes et postures, manipulation de produits chimiques, travaux en hauteur…).
- Prévention incendie et évacuation : exercices obligatoires, manipulation des extincteurs, mise en place de consignes.
- Premiers secours (SST) : obligatoire dans certains environnements à risques et fortement recommandé dans tous les secteurs.
- Hygiène alimentaire (HACCP) : incontournable pour la restauration et les métiers de l’alimentaire.
- Habilitations électriques et CACES : obligatoires pour les postes techniques ou de manutention.
Depuis la loi du 2 août 2021, la responsabilité de l’employeur est renforcée : il n’a plus seulement une obligation de moyens, mais une obligation de résultat en matière de sécurité. Autrement dit, en cas d’accident du travail ou de manquement avéré, l’entreprise peut être directement mise en cause.
Exemple concret : un manutentionnaire n’ayant pas reçu de formation gestes et postures et qui développe une maladie professionnelle peut engager la responsabilité de son employeur.
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3. Les droits des salariés : CPF, VAE et reconversion
En parallèle des formations imposées par l’entreprise, les salariés disposent de droits individuels :
- Le Compte Personnel de Formation (CPF) : chaque salarié cumule jusqu’à 500 € par an (plafonné à 5 000 €), ou 800 € pour les moins qualifiés (plafonné à 8 000 €). Depuis janvier 2025, une participation forfaitaire de 102,23 € est demandée au salarié, sauf si la formation est financée par l’employeur, un OPCO ou un autre organisme.
- La Validation des Acquis de l’Expérience (VAE) : elle permet de faire reconnaître officiellement les compétences acquises sur le terrain pour obtenir un diplôme ou une certification.
- La reconversion ou promotion par alternance (Pro-A) : dispositif adapté aux salariés qui souhaitent évoluer vers un nouveau métier ou obtenir une qualification supérieure.
Point de vigilance : l’utilisation du CPF relève de l’initiative du salarié. L’employeur ne peut ni l’imposer ni le bloquer, sauf si la formation se déroule sur le temps de travail.
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4. Les obligations de l’entreprise : anticiper les besoins et documenter les actions
Au-delà des formations obligatoires, l’employeur doit penser à long terme en mettant en place un plan de développement des compétences. Ce document définit les actions de formation nécessaires pour :
- adapter les salariés à leur poste,
- maintenir leur capacité à occuper un emploi malgré les évolutions,
- développer de nouvelles compétences (par exemple, compétences numériques, lutte contre l’illettrisme, maîtrise du français pour les salariés allophones).
Depuis 2019, un entretien professionnel doit être organisé tous les deux ans. Un état des lieux permet de vérifier si le salarié a :
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- suivi au moins une action de formation,
- acquis des éléments de certification.
- bénéficié d’une progression salariale ou professionnelle.
En cas de manquement, la sanction est automatique : un abondement de 3 000 € sur le CPF du salarié, à la charge de l’employeur.
Pour en savoir plus, n’hésitez pas à consulter notre article dédié à l’entretien professionnel via le lien suivant : Entretien professionnel : une obligation légale à ne pas négliger.
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5. Le financement de la formation : contribution légale et aides disponibles
Toutes les entreprises, même les plus petites, doivent participer au financement de la formation professionnelle via la Contribution à la formation professionnelle (CFP) :
- 0,55 % de la masse salariale pour les entreprises de moins de 11 salariés,
- 1 % pour celles de 11 salariés et plus.
S’y ajoute la taxe d’apprentissage, destinée à financer l’alternance et les formations technologiques.
Mais la bonne nouvelle est que les employeurs ne sont pas seuls : les OPCO (opérateurs de compétences) accompagnent les entreprises dans le financement et la mise en œuvre de leurs actions de formation. Selon l’OPCO dont dépend votre entreprise, certaines formations peuvent être prises en charge partiellement ou totalement.
Exemple : l’OPCO Akto (qui couvre de nombreuses branches comme le commerce, la propreté, la sécurité, les services à la personne, HCR etc.) propose via son Espace Formation un catalogue de formations sélectionnées par appel d’offres. Les prestataires retenus doivent respecter des engagements de qualité, et les coûts pédagogiques sont financés directement par l’OPCO totalement ou partiellement.
Pour un employeur, cela signifie moins de frais et un accès simplifié à des formations adaptées aux besoins de sa branche.
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6. Sanctions en cas de manquement : attention aux risques juridiques
Ignorer ses obligations de formation expose l’entreprise à plusieurs types de sanctions :
- Sanctions financières : abondement correctif du CPF (3 000 € par salarié concerné).
- Sanctions prud’homales : le salarié peut obtenir des dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de formation.
- Sanctions pénales : en cas d’accident lié à une absence de formation sécurité, la responsabilité du dirigeant peut être engagée.
Exemple : un salarié accidenté faute d’habilitation électrique obligatoire peut conduire à des poursuites pénales contre l’employeur.
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Conclusion : transformer une contrainte en opportunité
L’obligation de formation ne doit pas être vue comme une contrainte administrative, mais comme une opportunité stratégique. Bien gérée, elle permet :
- de sécuriser l’entreprise juridiquement,
- de réduire les accidents et arrêts de travail,
- de fidéliser les salariés,
- et de renforcer la compétitivité.
Grâce au soutien des OPCO et à une planification adaptée (plan de compétences, entretiens professionnels), même une PME peut transformer son obligation légale en un véritable levier de performance.
En résumé : investir dans la formation, c’est investir dans la pérennité de votre entreprise.
Et si vous souhaitez être accompagnés dans la mise en conformité et la gestion de vos obligations de formation, notre cabinet TWO WAY est à vos côtés pour vous conseiller et sécuriser vos pratiques.